jeudi 12 décembre 2013

L'improbable



Tout d'abord, on n'y prête pas attention. Les détails sont infimes. Juste un brin d'herbe dans la prairie qui ne se plie pas tout à fait de la même façon sous le vent qui passe.
Ensuite on essuie son regard comme le font les myopes avec les verres de leurs lunettes. Non, c'est toujours là. Dans le cinémascope de l'existence, un des projecteurs n'est plus synchronisé. Mais l'image est tellement dense qu'il faut un effort pour trouver ce qui a changé.
Et là, on se dit que c'est impossible. Qu'il manque quelque chose pour tout expliquer. On se prend à chercher des raisons, des explications raisonnables. Elles se laissent trouver par  dizaine, mais jamais tout à fait équilibrées.
Cela devient lancinant. Le regard achoppe maintenant sur ce qui cloche et cherche d'autres détails, d 'autres brins d'herbe. Et ceux ci deviennent évident.
Et puis un jour, au détour de l'anodin, tout devient clair. Les projecteurs sont à nouveau synchronisés.
L'improbable s'est produit. Juste là sous nos yeux.
Il ne reste plus qu'à s'asseoir avec un verre de très bonnes bulles ou tout autre liquide ambré.
L'improbable est toujours de l'ordre du possible.

lundi 14 octobre 2013

Page blanche

Il reste à l'écrire ou plus simplement à écrire.
La page qui s'ouvre ne porte nul signe, nul signet, aucune indication ni de règles à suivre.
Juste rien, de l'inconnu vers lequel on s'avance et dont on ignore tout.
Il ne faut pas emporter grand chose; quelques livres, un peu de musique, des feuilles et de l'encre et ce qui reste d'énergie pour aller au terme de l'histoire.
La page blanche est comme cette profonde nuit qui donne de voir l'étincelle. Un rendez vous qui a sans doute déjà trop tardé.
Tout ce qui a été écrit avant n'est plus de nous. Et c'est bien. On gardera les meilleurs passages, on jettera le reste. Cela n'a plus d'importance. Peut être le destin des grandes maisons vides était-il scellé depuis bien avant nous. Et lorsque l'on se trouve là où justement on ne voulait pas être, alors il convient de changer de place; d'aborder une page autre, à la blancheur d'écume et d'une autre profondeur.

dimanche 6 octobre 2013

Avancer


" L'évidence demeure le bouclier, aux atours séducteurs, de l'ignorance et de la paresse d'une pensée qui fuit les exigences de son angoisse."

Vas au plus profond de ta nuit et tu verras l'étincelle.

Peut être qu'il ne faut rien chercher parce qu'il n'y a rien à trouver. Juste goûter, regarder, sentir, avancer vers soi.

Peut être que le sens n'est pas caché dans d'obscurs bouquins ou de longues théories, mais juste là, sous nos yeux. La salade qui pousse dans le potager, une main d'enfant qui se tend pour avancer un peu plus loin dans l'immensité du jardin, un sourire au réveil, le parfum du café qui monte seul l'escalier, un visage sur une image qui montre qu'à cet instant la vie est bien réelle, et le temps qui passe et emporte tout.
Mais de ce temps nous aurons alors respirer le parfum de la vie.

jeudi 26 septembre 2013

Sylvebarbe


" Je ne suis du côté de personne parce que personne n'est de mon côté"

Il n'y a pas autre chose à ajouter.

 



lundi 17 juin 2013

Atteindre


( Si il y a un seul regard qui s'ouvre sur ces mots, alors ils seront justifiés.
 Le bureau de la poste restante a fermé ses portes, depuis longtemps. Mais cela n'empêche pas la plume electronique d'écrire)

J'ai longtemps cru que que l'on pouvait atteindre autrui avec des mots. Puis j'ai pensé que les gestes seraient à la hauteur de ce qu'il y avait à dire.
Pourtant, il faut se rendre à l'évidence.
Ne peut être atteint que celui qui le souhaite. Il était très naïf de croire le contraire.

Dans l'économie du don, il se trouve le contre-don. S'il est absent, la situation est celle de l'économie libérale. Le règne du pouvoir. Ou celui du devoir.

Mais il y a une chose que le pouvoir ne contrôle pas: la capacité à atteindre l'intérieur de soi. Même si l'intérieur de soi est ailleurs. Sur la crête d'une vague ou la quête d'un absolu.



vendredi 19 avril 2013

Poste restante (suite et fin)

Trop de questions, pas assez de réponses.
Effacer ce qui a été ecrit n'a pas de sens. Ce serait tenter de gommer les jours de la vie comme l'on fait disparaitre une esquisse qui ne convient pas.
Il n'y aura pas d'un jour peut être. L'anneau perdu ne remonte pas à la surface parce qu'il n'y a pas de hobbit pour se soucier de ce qui pousse et fleurit. Il y a seulement l'epaisseur des choses et la vague esperance que le temps arrange tout. Le temps n'arrange rien. Il ne fait que separer nos yeux de la lumière et de l'ombre.

Peut être la vraie vie est-elle d'être au coin de la rue et de n'attendre personne. Parce que le vrai est à l'air libre. Là haut sur le faîtage ou là-bas entre les vagues.
Je ne sais pas. Et je ne saurai pas. Je ne veux plus savoir.
Seulement respirer.

Prenez soin de vous.

mardi 26 février 2013

Juste un mauvais jour

 
C'est juste un mauvais jour qui passe. Comme d'autres.

Mais la vie n'est pas mauvaise. Elle est. Point. Pas de plus, pas de moins. Seulement la vie.

Le silence ne s'étend pas autour de moi. Il s'étend en moi. Les necessités restent à l'oeuvre et le soleil se lèvera demain.

Est-ce que le pion sacrifié de la partie d'echecs se plaint de sa destinée ? Au non de quoi le ferait-il, il semble qu'un interêt qui le dépasse soit à l'oeuvre.

Mais qui décide qu'un interêt plus grand s'impose au pion ?

...

Dans le silence de sa boîte, le pion a pensé qu'il serait temps de quitter le jeu.
Il faudra du temps. Ce temps pour forger la lame qui brise les amertumes.


dimanche 10 février 2013

La psychologie de la forme

Il est commun de dire, et penser, que l'esprit organise la matière.
Et si l'inverse etait vrai ?

Le présupposé vient sans doute des lois de la physique et des leçons de la philosophie, largement saupoudrées de théologie. Mais que sont les lois de la physique sinon des constructions intellectuelles pour donner un sens au monde alentour ? Que sont les leçons de la philosophie sinon un autre art de tenter de s'y retrouver ? Et qu'est-ce que la théologie sinon un vêtement pour masquer la nudité des questions sans réponse ?

La domination de la matière par l'esprit...

Les arbres "se parlent" et se portent assistance.
Le chat quantique est simultanément vivant et mort.
Selon que la chair soit agréable ou repulsive, l'esprit se détend ou s'arme, griffes et ongles.

La matière ordonne, elle résiste et conduit l'outil.

Et la matière est autre que sa composante chimique ou sa résistance mécanique. Si ce n'est pas vrai, alors adieu ce que l'on appelle amour.

C'est pourquoi, peut être, ce sont davantage les actes qui nous façonnent.

Mais il y a aussi l'option d'une unicité de l'une et de l'autre. Perspectives plus grandes.

jeudi 10 janvier 2013

Trois Cercles


Il y a dans un jardin, au sud des cartes, trois cercles de pierre, trois cercles concentriques.

Le plus petit est celui qui représente la façon dont le monde vous voit,
Le deuxième est celui qui dessine ce que vous croyez de vous
Le plus grand est celui qui dit ce qu'est votre être en réalité.

Dans ce jardin, à l'ombre des arbres, il ya un banc. Sur ce banc, au clair de lune des nuits d'été, on peut y deviner la présence d'une joie profonde, un peu ancienne mais toujours présente. Elle parle de tranquilité loin des clameurs, elle chuchote la caresse du souffle d'air sur la peau nue ou ces mots si profonds que le sens y vogue sans heurt.

On accède à ce jardin par la vieille porte du fond du rêve; celle qui est à l'abri sous les lierres, un peu rude à ouvrir entre les deux pans de mur eboulés que le temps n'a pas epargné.

J'y vais, de temps à autre (en fait, bien plus souvent qu'à mon tour), et je marche un instant. Toujours trop court.

Parce qu'il n'est pas simple de sentir le poème se heurter aux murs de béton qui s'avancent inexorablement vers nous, il reste le rêve qui transpire dans les gestes.